Footnotes

L'authenticité de cette œuvre a été confirmée par Jean-Yves Rolland. Cette œuvre sera incluse dans le prochain Catalogue Raisonné Henry Moret, actuellement en préparation.

The authenticity of this work has been confirmed by Jean-Yves Rolland. This work will be included in the forthcoming Henry Moret Catalogue Raisonné, currently being prepared.

Provenance
Collection particulière, France.
Collection particulière, France (par descendance).


Villégiature matricielle du peintre, le Finistère est le terreau incandescent des œuvres d'Henry Moret, qui portent en elles une virginité matinée par la grâce, tant ses paysages, à la scénographie elliptique, ne retiennent de leurs sujets, animés ou inanimés, que l'essence même de leur être : la douceur de l'écume qui, tendrement, vient s'échouer, le parfum vivace de l'herbe fraîchement broutée, l'enfance ensoleillée sur la mer... car ne filtre au travers des cils de son pinceau que son regard sensoriel et inquiet, apanage de celui qui recherche la perfection, toujours.
Non loin du paysage qui s'éveille sous nos yeux, Falaises à Clohars, temps calme, Henry Moret a rejoint Gauguin et ses amis (Emile Bernard, Charles Filiger, Paul Sérusier, etc.) à l'auberge de Marie Henry au Pouldu, avant de s'installer à Doëlan où sa palette tend vers le synthétisme, après avoir été un temps dans la veine de Corot et des peintres de Barbizon. Au contact des artistes de l'Ecole de Pont-Aven, sa touche s'inspire de l'estampe japonaise, par de larges aplats et l'usage modéré du cerne. Son art se pare alors d'une mission sacrée : rejeter le matérialisme et le rationalisme pour éveiller, par la couleur pure, le cœur du spectateur suivant par là-même le dogme de Gauguin, son père spirituel.
Dès 1891, Henry Moret commence ses longs séjours dans les îles du Ponant, qui, avec les côtes finistériennes, deviennent ses sujets de prédilection. Dans un équilibre enchanteur, viennent éclore en ses œuvres une peinture de l'instant et la décantation du souvenir révélée par ses couleurs étincelantes, les embruns qui s'empourprent et les moires fleuries que l'on voit luire au loin. Son pinceau, à partir de 1895, privilégie les effets atmosphériques ; ce qui ne manque pas d'attirer le célèbre marchand Paul Durand-Ruel, auprès duquel il collabore dès 1898. Ses tableaux habillent les cimaises de New York et de Paris, avant de rejoindre de prestigieuses collections privées et publiques. Le musée d'Orsay et celui de Boston comptent aujourd'hui ses œuvres parmi leur collection permanente.
Dans un jeu sensoriel subtil, la richesse infinie de sa palette n'est pas sans évoquer celle de Monet, avec lequel il a en partage le miroitement de sa touche.
Peintre libre et épris de solitude, à mesure des années, ses couleurs cloisonnantes s'évaporent au profit de teintes pénétrées, la vision narrative de la représentation se mouvant en une perception bergsonienne : chez Moret le temps est mobilité.
Véritable écrin de son art, l'œuvre que nous avons l'honneur de présenter dans notre vacation, conservée à l'abri des regards depuis près d'un demi-siècle, fut peinte en 1908. Elle corrobore le mot qu'écrivit au sujet du peintre Henry Eon quelques années auparavant : « Le plus simplement possible, Henry Moret ouvre une fenêtre sur la nature ».
Devant cette mer de clarté et de conquête, le peintre fait parvenir jusqu'à nous la palpitation de la brise marine. Cette œuvre, d'une infinie douceur, porte en elle l'irradiation d'une réminiscence.
De ces falaises, un instant endormies, le peintre n'en retient que le parfum, car Henry Moret appartient à ces artistes rares qui ont le don de transmettre la sensation de la vie. Il sait se saisir de l'insondable pour nous élever vers l'invisible. Cette aube ouverte dans le frémissement du vent est l'empreinte que l'on garde en soi de la torpeur d'un après-midi de printemps. Prince de la mémoire infinitésimale, Henry Moret ne dépeint pas des scènes, il capture les recoins du Temps.


The painter's foundational holiday home, in the Finistère region of Brittany, is the ground that formed Henry Moret's incandescent works. Their aura is one of virginal grace, as indeed the elliptical scenography of his landscapes, whether the subjects are animate or inanimate, retains only their very essence: the softness of the foam that tenderly washes ashore, the vivacious fragrance of freshly-grazed grass, a sunny childhood at the sea... for the lashes of his brush only filter his sensory, restless gaze, the prerogative of one who strives for perfection constantly.
Only a short ways from the landscape that awakens before our eyes, Falaises à Clohars, temps calme, Henry Moret joined Gauguin and his friends (Emile Bernard, Charles Filiger, Paul Sérusier, among others) at Marie Henry's inn at Le Pouldu, before settling in Doëlan where his palette drifted towards synthesis, after having favoured for a time the vocabulary of Corot and the Barbizon painters. As a result of his contacts with the artists of the Pont-Aven School, his pictorial touch was inspired by Japanese prints, with their broad colour fields and moderate use of outlines. His art undertook a sacred mission: to reject materialism and rationalism in order to awaken the viewer's heart through pure colour, following in the footsteps of Gauguin, his spiritual father.
In 1891, Henry Moret began spending long periods of time in the Ponant islands, which, along with the Finistère coast, became his favourite subject. In an enchanting balance, his works blossomed into paintings where he both captured the instant and the decantation of memories, revealed by his luminous colours, the crimson glow of the sea and the flowery patterns shimmering in the distance. From 1895 onwards, his brush excelled in atmospheric effects, which drew the famous art dealer Paul Durand-Ruel, whom he would work with from 1898 onwards. His paintings graced the walls of New York and Paris, before joining prestigious private and public collections. The Musée d'Orsay and the Boston Museum house his works in their permanent collections.
In a subtle sensory interplay, the sheer luxuriance of his palette might bring Monet to mind, for they share the art of a luminous touch.
At once untethered and solitary, as the years went by, his colour fields evaporated in favour of penetrating hues, the narrative vision of representation shifting into a Bergsonian perception: for Moret, time is mouvement.
A veritable showcase for his art, the work we have the honour of presenting in our sale, kept out of sight for almost half a century, was painted in 1908. It illustrates the words Henry Eon wrote about the painter a few years earlier: "As simply as possible, Henry Moret opens a window onto nature".
In front of this sea of clarity and conquest, the painter brings us the pulsation of the salty breeze. This infinitely tender composition radiates the delight of remembrance.
Of these cliffs, emerging from slumber, the painter retains only the fragrance, for Henry Moret belongs to those rare artists who have the gift of conveying the vibration of life. He knows how to capture the unfathomable so that we may access the intangible. This dawn awakening in the quivering wind bears the traces of a spring afternoon torpor. A Prince of the subtlest memories, Henry Moret does not depict scenes, he shows the folds of Time.